Depuis la publication de mon dernier article sur le sujet en juillet, la situation sur le terrain s’est encore dégradée. Le Japon a déjà enregistré sept décès liés à des attaques d’ours pour l’exercice 2025, un record depuis le début du suivi des données. Ce chiffre à lui seul traduit la gravité du phénomène : les attaques d’ours ne sont plus des incidents isolés, mais une réalité saisonnière à part entière.
Les autorités ont recensé des cas mortels à Hokkaidō (北海道), Iwate (岩手), Miyagi (宮城), Akita (秋田) et Nagano (長野). Au total, plus d’une centaine de personnes ont été blessées, souvent dans des contextes où les ours descendaient chercher nourriture et abri au plus près des habitations.
La raison tient en grande partie à la mauvaise récolte des noix et des glands cette année — des ressources essentielles avant l’hibernation. Privés de cette nourriture, les ours affamés quittent la montagne et s’aventurent dans les villages.
Dans la préfecture de Gunma, un ours est entré dans un supermarché de la ville de Numata et a blessé deux clients. À Shirakawa-gō (白川郷), un village classé au patrimoine mondial, un touriste espagnol a été attaqué alors qu’il se promenait sur un sentier. Ces événements, relayés par la presse japonaise (Mainichi Shimbun, Nippon.com), auraient été inimaginables il y a encore dix ans.
Les autorités locales réagissent en autorisant désormais des tirs préventifs en zone urbaine, mais la mesure reste difficile à appliquer : les chasseurs japonais sont peu nombreux, vieillissants, et souvent mal équipés pour faire face à ces situations imprévisibles. Pendant ce temps, la recherche tente une autre voie. Des scientifiques ont mis au point un système d’intelligence artificielle capable de prédire la présence d’ours dans une zone donnée avec environ 60 % de précision, en croisant des données environnementales et des images de caméras.
En lisant ces rapports, je repense à ce que j’écrivais il y a quelques mois : le vrai problème, c’est sans doute moins l’ours que l’absence d’humains dans ces territoires. Les montagnes, les forêts et les hameaux se vident — et la nature, elle, ne connaît pas le vide. Les ours ne deviennent pas plus agressifs ; c’est le Japon rural qui devient peut-être plus fragile.